Rédactrice : Sophie KERN, Alice Catherine ROY
Les premiers mots de l’enfant : quels facteurs pour quelle dynamique ?
Personne à contacter
Florence CHENU , Christophe DOS SANTOS , Gabriella FEKETE , Ludivine GLAS , Sophie KERN , Daniela VALENTE
Cadre de l'étude et objectifs
L’apprentissage du vocabulaire est essentiel dans l’acquisition d’une langue : sans mot, pas de langue. Or son processus de développement est un processus complexe pour lequel il reste encore bien des zones d’ombre. Et cet état de fait est particulièrement vrai pour les enfants typiques mais également pour des populations à risque de présenter des difficultés langagières ultérieures. Les objectifs des travaux menés dans cette action sont doubles :
- Décrire les étapes du développement communicatif au cours des 4 premières années de vie des enfants avec une focalisation sur le développement quantitatif et qualitatif du vocabulaire productif et réceptif entre 12 et 42 mois ; et encore plus particulièrement sur l’ordre d’acquisition et le niveau de justesse de production des mots.
- Etablir un modèle explicatif des trajectoires d’acquisition en mesurant simultanément l’effet des contraintes biomécaniques et cognitives d’une part et des caractéristiques de l’environnement langagier et culturel d’autre part.
Dans le cadre de cette action, deux projets principaux sont en cours :
- Développement quantitatif et qualitatif des premiers mots chez le jeune enfant.
- Caractéristiques du LAE en fonction de la situation et des langues.
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1. Développement quantitatif et qualitatif des premiers mots chez le jeune enfant.
Le vocabulaire productif des jeunes enfants est quantitativement et qualitativement très différent de celui des adultes (Fenson et al., 1993). Entre 1 et 3 ans, le vocabulaire des enfants est limité et les premiers mots peuvent être assez éloignés de la cible adulte ; éloignés phonologiquement, sémantiquement et/ou grammaticalement. Par ailleurs, certains mots sont acquis avant et/ou sont produits avec plus d’exactitude que les autres. Plusieurs facteurs ont été envisagés comme facteurs explicatifs des caractéristiques des premiers vocabulaires des enfants : le développement articulatoire lié au développement biomécanique de l’enfant, le développement conceptuel lié à son développement cognitif mais également l’input, c’est-à-dire la quantité et la nature des données linguistiques dans lesquelles l’enfant grandit. Mais peu de travaux considère la combinaison de ces facteurs.
Ce projet a pour objectif d’étudier l’acquisition lexicale, et plus particulièrement l’ordre d’acquisition des mots et la justesse de production dans une perspective translinguistique, longitudinale et holistique. Il s’agit de décrire et de modéliser la trajectoire d’acquisition du lexique chez les enfants en tenant compte de facteurs de nature différente : les facteurs liés aux capacités articulatoires (complexité articulatoire), aux capacités cognitives (catégorisation et mémoire) et aux caractéristiques de l’input (fréquence, densité de voisinage, contexte syntaxique, contexte situationnel). Ces facteurs jouent un rôle plus ou moins important sur le développement du lexique de l’enfant en fonction de son âge. Même si le développement du français sera toujours placé comme point de référence dans les travaux menés, une perspective translinguistique sera également adoptée afin de tenir compte dans notre modélisation des différences structurelles et fonctionnelles qui existent au sein des langues et de leur utilisation. Les analyses portent sur des corpora d’interactions adulte-enfant et des comptes rendus parentaux dans des milieux monolingues (français, anglais, tunisien, tachelhit) ou bilingue (français/portugais, thèse en cours Daniela Valente). L’intérêt de considérer ces langues en particulier réside également en leur appartenance à des familles de langue différentes et à leurs caractéristiques phonétiques et phonologiques très différenciées. L’ajout de populations bilingues permet également de mieux mesurer l’influence de l’input (qualité et quantité) sur le développement lexical. Une partie des corpora a été rassemblée dans le cadre de l'ANR PREMS 2012-2015.
2.Caractéristiques du LAE en fonction de la situation et des langues.
De nos jours, plusieurs recherches suggèrent clairement de considérer le contexte des interactions comme un important facteur dont dépend l’utilisation de formes spécifiques dans le langage adressé à l’enfant et dans le langage de l’enfant lui-même. Malgré cela, peu de travaux considèrent le type d’activités en cours comme un facteur à part entière. Et encore moins nombreuses sont les recherches qui mesurent l’effet combiné du type d’activités et des caractéristiques typologiques de la langue à acquérir. L’objectif des travaux menés ici est de mesurer l’effet des activités en cours et de la langue sur le comportement interactif et langagier des adultes et des enfants (voir Thèse en cours de Ludivine Glas). Deux contextes d’interactions sont considérés : interactions parent-enfant au domicile des parents et interactions adultes-enfants en crèche (Projet Stimulanc). Les activités réalisées au cours de ces interactions diffèrent également : les échanges libres, le repas, la lecture d’album ou encore le change. Les interactions parent/enfant ont été réalisées au sein de familles francophones en France mais également turcophones en Turquie.
Financements
- ANR Programme Blanc SHS 2
PREMS : Influence du développement phonologique et de l'input sur les premiers mots Agence Nationale de la Recherche 2012-2015 - Labex ASLAN
STIMULAN: Stimulations langagières en crèche Labex ASLAN - Université de Lyon
Publications
- Alkimanis, F., Kern, S., Sofu, H., 2014, "When context matters more than language: Verb or noun in French and Turkish caregiver speech", First Language, 34:6, pp. 537-550
- Kern, S., dos Santos, C., 2018, "Invariance in variation: frequency and neighbourhood density as explanatory factors ", Trends in Language Acquisition Research, 22, pp. 183-200
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